L'abandon

Aujourd'hui j'ai mangé avec mon fils pour lui dire au revoir. Il part dans un camp d'été comme guide. Il commence presqu'à peine à m'accepter. Mon divorce l'a frappé et c'est normale. Je suis heureuse de nous voir reprendre notre souffle. Nous étions tous les deux un peu confondus. Mon chemin n'est pas évident car j'ai une complexité d'inclinations en moi. Je crois que j'arrive peu à peu à placer chaque discipline en moi dans son espace. Je crois que je pars en Israel cet été. Je ne suis pas tout à fait sûre encore, on verra. Ma professeur de chant d'opéra en français part pour Vienne et je ne la reverrai plus. C'est horrible. Je ne savais rien et hier j'ai eu ma dernière classe avec elle. On chantait יAdieu, notre petite table' de Manon. La chanson s'étranglait dans ma gorge et je dissuadais mes larmes. J'aimais son énergie chez moi et dans ma voix, dans mes chants. Elle doit poursuivre ses rêves et son développement. Qui suis-je dans son histoire? Elle dit adieu à sa terre, à sa famille, à son petit ami. Mais pour moi, elle était un personnage très important. Je ne peux même pas lui demander de m'écrire. Elle n'aura pas le temps de le faire, moi non plus. On travaillait avec ma voix. C'est ce qu'on avait en commun. Ma voix reste seule et abandonnée. Je pleure en silence, je traine. Quoi faire? Il y a des tas de problèmes pratiques et de violence sur terre, où peux-je placer mon chagrin? Je veux m'enfuir, abandonner la planète! Je veux m'en aller avec mes chants et mes larmes dans une autre planète! Je ne peux rien lui dire à ma professeur. Je peux seulement me taire et chanter Manon avec toutes mes forces pour libérer l'injustice de cette planète. Je veux m'en aller vers mon trou noir dans ma cave du Tepozteco et chanter mes vides, l'abandon qui m'habite.